ReFeRe
Cinq
grandes questions
retour à RADIO ALTER EGO
et les réponses
nettes
et en 2 minutes
du Directeur-en-Chef, à écouter - ou
à lire.
été 2011- MMI/AEE
à Sauvigny
L’esprit, en un mot ?
C’est
un événement planétaire, le Musée des mondes imaginaires accueille à
Sauvigny les maquettes de la ReFeRe. Le monde de la ReFeRe, les réseaux
ferrés réunis, vous le connaissiez et, chers auditeurs, l’admiriez
jusque-là sur vos écrans. Événement, je dis bien, on peut maintenant le
voir et presque le toucher en petit, à l’échelle du 1/87e ça veut dire
que vous y seriez haut de 2 centimètres. L’exposition est en France,
dans un lieu extraordinaire, mais l’événement dans l’événement, c’est
l’entretien que nous accorde le Directeur-en-Chef de la ReFeRe
lui-même.
Monsieur le Directeur, Président et Fondateur, merci
d’être à notre micro. Les auditeurs ont demandé le silence autour
d’eux. Entrons dans le vif du sujet. Tout d’abord, quel est, en un mot,
l’esprit de la ReFeRe ?
Épiméthée.
Ah Épiméthée ! Superbe patronage !
Une figure intéressante de la mythologie grecque !
Mais
complexe ! Quel aspect de la personnalité du personnage vous a guidé,
inspiré ? En psycho, on parle du caractère épiméthéen…
Épiméthée,
pour qui l’aurait oublié, est un titan, le frère de Prométhée et
d’Atlas. La ReFeRe, c’est en effet titanesque ! Mais Épiméthée est un
titan spécial : il est un créateur, il invente les animaux qu’il munit
de qualités. Il est aussi mari de Pandore – mais qu’est-ce que la
ReFeRe a à voir avec sa boîte ?
Rien, Épiméthée, c’est celui qui réfléchit après – c’est ce que
signifie son nom en grec ancien.
J’ai
en effet créé la ReFeRe comme c’est venu, de chic comme disent les
peintres, sans plan, sans réfléchir avant d’agir. C’est après que j’ai
travaillé à fabriquer une raison d’être à tous les éléments, à tous les
mouvements et que j’ai rédigé les explications – celles qui sont
exposées sur le site et dans mes ouvrages. Tout a été trouvé après
coup. Au fur et à mesure et en fonction des besoins et des aléas.
Quant à Épiméthée, ça ne fait pas longtemps que je l’ai déterré.
Donc,
sans planification, sans modèle, sans prévisualisation, la ReFeRe qui
est, je le redis, une construction titanesque est vraiment une
entreprise-monde. Est-ce le meilleur des mondes possibles ? Je voudrais
aborder avec vous 3 sujets un tout petit peu délicats, 3 sujets de
société qui touchent particulièrement nos auditeurs.
La parité au
travail ?
Abordons
si vous le voulez bien le problème du personnel, des employés, des
cheminots, des ouvriers : l’emploi, la formation, l’hygiène et la
sécurité, la retraite, les cadences, la parité…
Quelle est la
situation des femmes dans cette entreprise ? On ne voit pas de
cheminotes ni de thermodynamiciennes ni de pelleteuses. Elles seraient
moins performantes ?
Pas du tout ! On n’en recrute pas
parce qu’il n’y a jamais de candidate ! Aucun pays fournisseur de
main-d’œuvre n’en propose à cette échelle ! Il n’est pas question de
sexisme : tout le monde apprécie le travail de la cantinière du
Resto-U. Ses travailleurs – et une ou deux travailleuses - la ReFeRe
les recrute chez divers fournisseurs de « bonshommes » et veille,
croyez-le, à l’anthropodiversité. Mais l’offre est très typée, très
germanoétats-unienne. Je lance un appel…
Vous
continuez de chercher, c’est déjà ça. Le personnel – des mâles blancs
donc – n’est-il pas exploité au regard des critères des démocraties
occidentales ?
Pas du tout ! Tous les employés sont
volontaires, c’est écrit dans leur contrat. Les avantages acquis sont
considérables : ils sont transportés sur notre réseau gratuitement ! On
les habille, on les nourrit régulièrement !
Et si vous observez
bien leur activité, vous conviendrez qu’ils se la coulent douce. Ils ne
se remuent pas beaucoup ! Les dispositifs de surveillance les
enregistrent toujours à la même place dans la même posture ! C’est du
travail pénible ça ? Pour des figurants, ils sont bien traités. Je ne
les entends pas se plaindre…
C’est noté,
la ReFeRe est un réseau social. Avec une grande intensité d’échanges…
dont l’innocuité serait problématique… Je vais préciser.
Trafic de toxiques ?
La
ReFeRe est, nous en sommes désormais convaincus, une organisation
soucieuse du bien-être de son personnel. Mais qu’en est-il de la santé
de la Planète et de ses autres habitants ? La ReFeRe – c’est en toutes
lettres sur son site officiel - produit pour l’exportation des produits
très dangereux, des POP (polluants organiques permanents), des métaux
lourds, des toxiques lents, des perturbateurs endocriniens et des
contaminants divers pour l’export. Ces produits sont extrêmement
dangereux, coupables d’empoisonnements et de malformations… C’est ce
qui ferait leur intérêt pour l’économie de la ReFeRe ?
Si j’ai
bien compris, dans votre complexe connu sous le nom de Nucléaire,
précisément dans l’Atelier d’enrichissement, vous recyclez des déchets
faiblement pollués récupérés à l’étranger pour fabriquer des concentrés
hypertoxiques et des contaminants hypersouillants à haute valeur
commerciale. Vous les revendez conditionnés en bidons ou en caisses qui
n’ont l’air de rien et qui sont transportés dans des wagons banalisés.
Vous pouvez justifier cette démarche industrielle ?
C’est
économiquement intéressant. Ce qu’on tire de la vente sert à importer
une partie de ce qu’on ne fabrique pas : des rails, des bases de wagon,
des moteurs de locomotive et du personnel – et tout ça ce n’est pas
donné !
Ce qu’en font nos acheteurs dans l’agro-alimentaire ne nous regarde pas
ou plutôt ne nous implique pas.
Sur
Internet, vous avez publié une hypothèse. On aurait besoin de vos
produits pour maintenir les normes. En gros – et ça me paraît très gros
– le fabriquant qui sort un aliment très pur, avec par exemple un taux
de FPR inférieur à la norme fixée par la Food and Drug, rajoute du FPR
jusqu’à arriver au ras de la teneur autorisée. Faute de quoi, il risque
de voir la Food and Drug abaisser la norme. Ce qui lui compliquerait la
vie. C’est logique mais un peu limite non ? Vous y croyez ?
Je
l’ai vu faire, dans une vie antérieure et dans le monde réel… Je ne
l’ai pas inventé. Pour le reste, on est dans un monde imaginé et
imaginaire.
On retiendra la formule ! Et
laissons le chimique aux chimistes et les alarmes aux alarmistes. Il me
reste à soulever un sujet plus grave.
Et le paysage ?
Dans
le peu de temps qui nous reste, je voudrais qu’on aborde la question
fondamentale, essentielle, du paysage. Des chercheurs ont beaucoup
publié sur l’esthétique du concrete.
Il faut rappeler aux
auditeurs qui découvrent ou redécouvrent la ReFeRe que la ReFeRe, ses
infrastructures et ses superstructures, c’est du concrete, c’est en
concrete. Un matériau puissant, créatif et original. Ciment plus
amiante, pour l’essentiel. Ici, pas de bois, pas de briques, pas
d’acier, pas de pierre de Bourgogne, pas d’adobe ni de tuffeau comme
ailleurs. Le concrete est produit en plaques planes. Il est grisâtre à
l’origine, il est toujours peint, souvent en grisâtre. D’où cette
allure particulière que rend si bien le carton, sur la maquette.
En
tous cas, ça donne une ambiance spéciale. Certains universitaires ont
avancé le concept de paysage sous contrainte, quasi oulipien. D’autres
ont analysé l’hybridation entre le look « Europe de l’Est » et les
formes « banlieue de Casa », en passant à mon avis à côté de bien des
influences… On pourrait citer les travaux sur le concept de
non-bucolisme implicite… Je m’arrête là et vous laisse la parole. Et
vous nous direz un mot du Printemps de la ReFeRe ?
Le
concrete n’est pas un matériau noble mais on n’a pas honte ; il impose
des contraintes comme vous dites mais nos concreturgistes font des
prouesses et, en tous cas, parviennent à ce que ne soient jamais
construits deux bâtiments ou deux wagons semblables ni de la même
couleur. Le paysage ici est fait entièrement d’artéfacts ; il est
intéressant en soi, avec un pittoresque bien à lui. Il n’y a aucun
arbre, pas la moindre végétation, ça donne un cachet à part : on n’est
pas en Forêt-Noire, comme sur beaucoup de réseaux. Je peux vous dire
qu’on vient de loin pour voir ça.
Certainement,
quand on est devant ce paysage, on le regarde, d’ailleurs il n’y en a
pas d’autre. Un mot, rapidement, sur votre projet ? On attend une
révolution à moins de se contenter de celle qui se fait tous les jours
de ces trains qui tournent en rond – pardon en huit. Mais je présume
que vous avez imaginé autre chose…
En projet ?
Dévoilez-nous s’il vous plait, nos
auditeurs sont toute ouïe, vos intentions au jour d’aujourd’hui.
Le
printemps… ce sera celui de l’an prochain ou du suivant… Le Printemps
de la ReFeRe, permettez cette image, est déjà sur les rails. Croyez-le,
et imaginez ce monde : il y aura des jardins entre les voies, des
cabanes de jardin, des arbres, des places à la place des friches
industrielles avec des bancs, des fontaines, des kiosques et des
statues. Il y aura un local pour l’altermodélisme ferroviaire ; il y
aura du land art, des expos dans les bâtiments et les wagons
désaffectés et aussi des installations.
C’est un projet grandiose ; vous le
financerez comment, ce sera où ?
J’allais
préciser que tout ceci se fera en des lieux et avec des matériaux que
je mets gracieusement, je tiens à la dire, à disposition des artistes
bénévoles choisis parmi les meilleurs de mes employés qui accueilleront
les visiteurs, et entretiendront et garderont les œuvres que j’aurai
créées. Ce sera où ? Sur un îlot que vous ne connaissez pas.
Merci
infiniment ! Rendez-vous est pris, bien sûr, On est impatients. Vos
réponses ont été franches et instructives, sur des sujets lourds « de
société », sans langue de concrete si je peux me permettre... Ceux qui
n’ont pas tout saisi pourront réécouter à loisir cette interview sur le
site officiel de la ReFeRe à fraval point refere point x y z tout en minuscules
et même lire la transcription s’ils entendent mal. L’émission est
terminée et je n’ai pas le temps de citer
l’abondante bibliographie que j’avais préparée, en fait il suffit
d’aller sur le site Internet, immensément riche. On peut réécouter
cette émission en cliquant sur la case de gauche. Une petite seconde
pour dire aux auditeurs que ce qu’il ne faut pas manquer, surtout,
c’est l’exposition des maquettes, avec là aussi de nombreux documents,
à Sauvigny - en Bourgogne - où l’on s’y croirait, où ce monde de
concrete est représenté en tout petit en carton au Musée des mondes
imaginaires Atelier Alter Ego, vraiment à ne manquer sous aucun
prétexte et à recommander à tous !